Pays de Galles, XIème siècle. Capturé alors qu’il tentait de kidnapper le shérif Richard de Granville, Will Ecarlate attend dans une cellule que vienne le jour de sa pendaison. Dans le but d’obtenir des informations, un moine scribe vient l’interroger, et tel une Shéhérazade celte Will raconte, gagnant chaque jour un sursis supplémentaire. Car Will, en tant qu’archer émérite et membre de la bande des hors-la-loi du Roi Corbeau, a peut-être en sa possession les informations qui mèneront ses geôliers sur la piste de Rhi Bran Hud…

Il existe d’innombrables versions de Robin des Bois, si bien que tous les personnages nous sont familiers, comme des compagnons de notre enfance. En les transposant dans le Pays de Galles du XIème siècle, l’auteur nous propose une version rugueuse, presque primale de ces personnages de notre patrimoine littéraire et culturel. C’est d’ailleurs ainsi qu’il positionne son histoire, en la plaçant chronologiquement avant toutes les versions de Robin des Bois que nous pouvons connaître, et la présentant ainsi comme l’histoire à l’origine de la légende.

Dans ce deuxième volume d’une trilogie, Rhi Bran Hud/ Robin Hood nous est présenté par l’intermédiaire d’un personnage secondaire: Will Scatlocke (qui deviendra plus tard Will Scarlett) a tout perdu lorsque le propriétaire foncier dont il dépendait a été exproprié au profit de nouveaux maîtres normands. Parce qu’il n’a plus de ressources  Will part à la recherche d’un semblant d’espoir, incarné par un rebelle charismatique qui hante la forêt des Marches. C’est par le biais d’un autre personnage à la fois secondaire et emblématique de l’histoire que la trilogie se terminera: le frère Tuck. Mais j’anticipe.

L’écriture est remarquable, la plupart du temps vigoureuse, n’hésitant pas à jouer la carte du suranné dans les dialogues afin de bien nous rappeler que nous sommes au XIème siècle, dans un monde où tous les personnages ne parlent pas la même langue, entre les envahisseurs ffreincs, les régnants anglais et les gallois dont les terres sont confisquées par leurs nouveaux maîtres. L’auteur n’est pas gêné d’avoir du vocabulaire, et de proposer des images littéraires belles et fortes, et c’est tant mieux.

On notera en passant que non content de réécrire l’histoire de Robin des Bois, Stephen R. Lawhead propose une version toute personnelle d’un personnage fictif inventé par Susanna Clarke dans son roman « Jonathan Strange et Mister Norrell », donnant une réalité à un personnage inventé en 2004. En effet il n’y a pas grand rapport entre ces deux Rois Corbeaux, mais on pourrait bien finir par croire qu’il a toujours existé.

Mythologie celtique et intrigues politiques se mêlent sans jamais s’emmêler, et dans ce volume sont dénouées bon nombres d’intrigues et d’embûches. Une partie de l’histoire s’achève tandis que sont posés les jalons d’une configuration nouvelle dans laquelle Rhi Bran et et ses comparses n’en ont pas fini de lutter pour obtenir justice.

À recommander donc.