Évoluant entre post rock et ambient, les cinq musiciens allemands de There’s A Light viennent de sortir For What May I Hope? For What Must We Hope?, leur troisième album. Markus Dodd, l’un des guitaristes du groupe, est notre invité…
Bonjour, Markus. Corrige-moi si je me trompe, mais il y a une chose que j’ai remarquée rien qu’en parcourant les titres de la tracklist de l’album : on dirait que les autres membres du groupe et toi êtes tous des gens très positifs…
Je ne vais pas te contredire, c’est tout à fait exact. Malgré tout ce qu’on doit traverser de pénible dans l’existence, nous prenons tous les cinq la vie avec le sourire, d’une façon positive et optimiste. Et cet état d’esprit commun facilite beaucoup notre travail en tant que groupe.
Il y a sûrement beaucoup de monde qui a découvert votre musique avec le clip Elpis, sorti il y a peu de temps. Et ce qu’on remarque en premier, c’est votre logo, d’aspect très mathématique, géométrique. A-t-il une signification particulière ?
Non, je n’irai pas jusqu’à dire ça. Ce logo a été créé par Oliver Hummel d’Hummelgrafik. C’est lui, aussi, qui a créé tout l’artwork de l’album ainsi que celui de A Long Lost Silence, notre précédent CD. On a adoré ce logo dès qu’il nous l’a proposé. Il n’évoque pas tant la géométrie que la physique : c’est un prisme, il difracte la lumière, une propriété qui colle vraiment bien à notre groupe.
Pour en rester au clip, la jeune femme blonde à l’image évoque à mes yeux une allégorie. Pourrais-tu nous en dire plus à son sujet ?
Dans la mythologie grecque, Elpis est la personnification de l’espoir, et c’est l’espoir, justement, que le personnage recherche dans la vidéo. Peut-être faut-il la prendre pour une allégorie dans le sens où elle personnifierait le doute et l’errance, et alors elle est à la recherche de quelque chose à laquelle elle pourrait s’accrocher. Grâce à l’espoir, elle y parvient et la pierre représenterait cet espoir… Mais ce qui est bien avec cette vidéo — et plus généralement avec notre musique — c’est que chacun peut l’interpréter à sa manière et imaginer sa propre histoire. L’idée directrice du clip vient de Rob de Vestra-Visuals, qui l’a aussi filmé et réalisé.
There’s a Light est un groupe étiqueté « post rock » et je me demandais si cette appellation collait vraiment bien à ce que vous faites. Comment qualifieriez-vous ce qui fait l’essence de votre musique ?
C’est sûr, Napalm, c’est un label metal et peut-être qu’on n’a pas tout à fait notre place dans leur catalogue. Mais on n’y est pas tout seuls, il y a d’autres groupes post rock dans la maison, par exemple Oh Hiroshima ou encore God is an Astronaut… Maintenant, quant à savoir si on est vraiment un groupe post rock, c’est une bonne question. Disons que nous sommes cinq gars qui composent ensemble en mêlant leurs influences respectives pour aboutir à un style personnel. Et en définitive, on parvient à un résultat qui sonne bien comme du post rock.
Comment vous y prenez-vous pour composer ? On a l’impression que la guitare domine chaque morceau, mais ce n’est peut-être pas cet instrument qui constitue le point de départ…
Les morceaux partent souvent d’une idée de riff venant de moi-même ou de David, mais en effet, le point de départ peut aussi venir d’instruments électroniques : c’est ce qui s’est passé avec les deux derniers morceaux du nouvel album, qui ont été écrits par notre batteur Jan avec un clavier midi et son PC. Beaucoup de morceaux sont créés ainsi, à partir d’une idée suggérée par l’un d’entre nous. Et si on aime l’idée — comme je disais, juste un riff ou une simple base rythmique —, eh bien on essaie d’en faire une chanson. Parfois en constituant des petits groupes, parfois tous ensemble dans la salle où on répète. Et on essaie le plus possible de mélanger nos idées.
Pour des chansons plus conventionnelles — j’entends par là des chansons incluant forcément des paroles —, les choix de titres semblent souvent évidents. Mais c’est moins le cas lorsqu’il est question de musique instrumentale. Comment décidez-vous des titres que vous donnez à vos morceaux ?
On s’assied tous ensemble (y compris en passant par Skype, à cause de la pandémie) et chacun parle de la manière dont il reçoit chaque morceau. Le thème général de l’album, c’était l’espoir, alors nous avons dirigé nos impressions dans ce sens. La chanson Magnolia, par exemple, nous faisait songer au printemps, à l’éclosion des fleurs, ce qui est une belle métaphore de l’espoir. Et le magnolia est une fleur superbe, magnifique quand elle est en pleine efflorescence. D’où notre décision unanime d’en faire le titre du morceau.
Pensez-vous que votre musique exige un certain état d’esprit pour que l’auditeur s’y plonge ? Ou au contraire, espérez-vous que la musique aura une influence sur l’humeur de qui l’écoute ?
C’est vrai que notre musique est assez chargée en émotions et elle semble s’adresser, par exemple, à des auditeurs dans un état disons mélancolique. Mais je ne pense pas que ce soit absolument indispensable : si nos compositions touchent la corde sensible des gens, quelle que soit leur humeur au moment de l’écoute, alors cela veut dire qu’on a atteint notre but et on en sera tous très heureux ! C’est notre motivation première quand on compose. Après, il faut reconnaître que nos morceaux sont plus longs que 95% des titres accessibles sur les plateformes, ce qui exige des auditeurs qu’ils prennent leur temps pour nous écouter. Alors il vaut mieux éviter d’être énervé à ce moment-là (rires) !
Vous-même, dans le groupe, qu’est-ce que vous écoutez comme styles de musique ?
En ce qui me concerne, j’écoute plein de genres différents : du rock alternatif, de l’indé, du metalcore et du posthardcore, du hip-hop, du rap et même de la pop (l’album Future Nostalgia de Dua Lipa, par exemple). De l’électro, aussi, mais la plupart du temps je donne dans le rock un peu plus lourd. Les autres membres du groupe sont dans le même cas, ils écoutent de tout, et c’est aussi de là que nous viennent toutes nos influences.
Le dernier album que tu as découvert, qu’est-ce que c’était ?
Le tout dernier que j’ai écouté avec grand plaisir, c’était Dimly Lit de From Indian Lakes. C’est un album qui est sorti en 2019.
Et le tout dernier que tu as adoré de la première à la dernière note ?
Le dernier album de Thrice, intitulé Horizons/East. Parfait en tous points, et avec une production impeccable.
Un grand merci pour tes réponses, Markus ! On te souhaite une très bonne fin d’année, et j’espère pouvoir bientôt voir There’s a Light sur scène, par une belle journée…
Merci à toi pour l’interview ! Nous aussi espérons tous pouvoir jouer notre nouvel album sur scène dès que possible…
Propos recueillis en décembre 2021. Many thanks to Lisa Gratzke (Napalm Records Berlin).
L’album For What May I Hope? For What Must We Hope? est sorti le 10 décembre 2021.
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