Dans les salles de concert comme en festival, en tête d’affiche comme en première partie (elle a récemment suivi les Américains de Kamelot dans leur tournée européenne, elle tournera en juin avec Arch Enemy), Melissa Bonny donne l’impression d’être sur tous les fronts, à la tête de son groupe Ad Infinitum (qui a sorti cette année un troisième album) et à présent avec The Dark Side of the Moon. Un nouveau projet musical monté avec le batteur d’Amaranthe Morten Løwe Sørensen et deux membres du groupe allemand Feuerschwanz, Jenny Diehl (harpe) et Hans Platz (guitare). Le premier album de The Dark Side of the Moon vient de sortir chez Napalm Records.
Khimaira : Bonjour Melissa, je te remercie pour cet entretien car à ce qu’on m’a dit tu es plutôt occupée en ce moment, avec plein de concerts qui ont eu lieu ou qui sont prévus. Comment se passe cette tournée ?
Melissa Bonny : Ça va très bien ! On vient de rentrer à la maison après quatre shows en Allemagne pour marquer la sortie du premier album de The Dark Side of the Moon. Des concerts qu’on a donnés en première partie de Feuerschwanz. À présent on va pouvoir profiter de quelques semaines de répit avant le début de la saison des festivals.
J’ai l’impression, en suivant tes multiples apparitions chez les uns et les autres, en écoutant les titres que tu as enregistrés en duo, que tu t’es constitué comme une grande famille dans le milieu musical…
Oui, tout à fait. C’est amusant que tu fasses ce commentaire parce qu’on nous a fait la même remarque la semaine dernière à l’issue de notre concert à Oberhausen. Quelqu’un nous a dit en riant qu’on avait l’air d’être une grande famille, qu’on avait constitué plusieurs groupes et que les musiciens de tel groupe venaient intégrer telle autre formation et qu’on fonctionnait comme ça, en tournant toujours avec les mêmes équipes et les mêmes techniciens. Bon, ça ne se passe quand même pas tout à fait comme ça (rires) !
Si j’en crois le dossier de presse, The Dark Side of the Moon est un groupe né d’un pari. Peux-tu nous en dire plus à ce sujet ?
J’ai fait la connaissance de Hans en 2020 lorsque Feuerschwanz m’a demandé de participer à l’enregistrement de la chanson Ding ainsi qu’au tournage du clip. Hans et moi sommes devenus amis et, un peu plus tard, le clip de Ding et celui d’Unstoppable d’Ad Infinitum sont arrivés en même temps sur YouTube. Au bout d’un moment, les deux vidéos se sont approchées du cap du million de vues, et j’ai lancé à Hans sur le ton de la plaisanterie que le premier qui atteindrait le million aurait gagné ! On s’est mis d’accord sur le principe d’un gage que le vainqueur imposerait à l’autre, et il se trouve que c’est Ding qui a totalisé le million de vues en premier ! Hans a choisi le gage : enregistrer avec lui une reprise metal d’une chanson de Game of Thrones. On a choisi Jenny Of Oldstones, que Hans a ensuite fait écouter aux gens du management de Feuerschwanz. Ils ont trouvé que ce n’était pas mal du tout et nous ont suggéré de faire un album. Tout a démarré comme ça !
La dernière fois que nous nous sommes parlé, c’était en octobre 2021. À l’époque, The Dark Side of the Moon était encore un projet tout neuf, et j’ai l’impression qu’il a maintenant pris plus d’importance. Pas autant qu’Ad Infinitum, mais tout de même…
Forcément, maintenant que l’album est sorti et que des concerts sont bookés, les choses prennent de l’ampleur. En 2021, on pouvait difficilement imaginer comment tout cela pourrait s’organiser puisque nous faisons partie tous les quatre d’autres groupes qui tournent beaucoup. Il faut jongler avec nos agendas respectifs, mais on a finalement réussi à dégager du temps pour réaliser tout l’album et les clips qui l’accompagnent. L’ensemble s’est un peu étalé dans le temps : Jenny of Olstones est sorti en single à l’été 2021, ensuite il a fallu composer des titres car l’album n’est pas constitué que de reprises — il y a trois chansons originales dans la tracklist. Nous avions aussi le projet de tourner plus de clips que pour une promo d’album classique, habituellement trois clips en trois mois. On avait vraiment envie de présenter plus de singles.
Tu as monté The Dark Side of the Moon avec ton compagnon, Morten. Est-ce que cela apporte un plus, le fait de travailler en couple au sein d’un groupe ?
Oui, parce qu’on passe beaucoup de temps sur la route chacun de son côté, lui avec Amaranthe et moi avec Ad Infinitum. Récemment je suis partie un mois entier en tournée avec Kamelot pour assurer la première partie de leurs concerts. Pouvoir à présent faire des shows ensemble, c’est vraiment appréciable !
Lors de notre précédent entretien, nous avons parlé de Dracula, et cette fois il se trouve que la plupart des chansons de Metamorphosis sont d’une part des reprises, mais surtout des chansons tirées de films, de jeux vidéo, de séries. D’où l’impression que tu as un background très marqué par la pop culture et les genres de l’imaginaire…
C’était une décision commune d’orienter cet album vers la fantasy, d’aller chercher du côté du Seigneur des Anneaux, d’Harry Potter, de Game of Thrones, vers ce genre de films, de séries et de jeux qui touchent au fantastique. Nous sommes tous les quatre très fans de ces univers et cela n’a pas été très compliqué de se mettre d’accord sur les titres qu’on allait reprendre pour notre album. On visionné des films et des séries, certains ont fait écouter des morceaux que les autres ne connaissaient pas du tout, par exemple The Wolven Storm, qui est tirée du jeu vidéo ‘The Witcher’ et qui a été proposé par Jenny, la harpiste du groupe.
Dans l’ensemble, le chant comme les arrangements sont un peu moins « heavy » que ce que tu fais d’habitude. Cela est-il dû justement au fait que Jenny fait partie du groupe et qu’il s’agit aussi de laisser de la place à la harpe, un instrument assez discret ?
C’est une bonne question… Il y a des morceaux qu’on a un peu modifiés dans ce sens, c’est vrai, par exemple l’intro et l’outro de Legends Never Die, qui se prêtaient très bien à son instrument. Ce n’est pas le seul changement qu’on a apporté à ce titre, d’ailleurs, car la chanson d’origine est très pop et pour la transformer en un titre metal, il a fallu en repenser toutes les parties pour qu’elles correspondent à nos instruments.
En toute honnêteté, je trouve qu’elle a acquis de cette façon une envergure qu’elle n’a pas du tout dans sa version d’origine…
Pour ma part, j’aime beaucoup aussi la version initiale. Et je dois dire que c’est l’une de mes préférées à interpréter : pendant les quatre shows de la semaine dernière, c’est sans conteste une de celles qui a le plus d’impact sur scène.
Le fait de reprendre tous ces titres pour un album implique-t-il de devoir régler des questions de droits ?
On doit bien sûr demander des autorisations des différentes licences. Il faut obtenir deux autorisations différentes, en fait : une pour l’audio, et l’autre pour le visuel s’il est aussi question de tourner un clip. Cela dit, je ne suis pas experte en la matière, c’est un aspect juridique qui en soi n’est pas très fun, et qui a été traité entièrement par les gens de Napalm Records.
Puisque nous parlons beaucoup de reprises, je tiens à te dire que j’ai été agréablement surpris par celle que tu as enregistrée de Venom of Venus, qu’on peut entendre dans la version « deluxe » du dernier album de Powerwolf. Une chanson que j’ai l’habitude d’entendre avec la voix d’Attila, et tu as choisi de l’interpréter d’une voix très haute, presque cristalline, et je trouve que ça convient à merveille. As-tu fait plusieurs essais de chants différents avant d’arriver à ce résultat ?
Cela a représenté pas mal de travail, c’est vrai, avec beaucoup d’essais en studio. C’est le genre d’entreprise qui se déroule en deux étapes : il faut commencer par apprendre la chanson, et ensuite il faut se l’approprier. D’où un temps assez conséquent passé en studio avec Jacob Hansen : on a enregistré plusieurs prises pour chaque partie, en changeant à chaque fois l’intention, même parfois de façon minime. Il était important pour moi de ne pas rester trop proche de l’original, afin que les auditeurs qui connaissent bien la chanson la redécouvrent en écoutant ma version.
Tu parlais tout à l’heure de la saison des festivals qui va bientôt commencer. Y en a-t-il où on a des chances de te croiser, pas forcément en tant qu’artiste mais aussi en tant que spectatrice ?
Nous avons en effet beaucoup de dates prévues, notamment avec Arch Enemy et ça, c’est vraiment cool ! Plus des participations à différents festivals, par exemple Masters of Rock. Sinon, même s’il fut un temps où j’allais voir beaucoup de concerts de tous styles, je dois dire que je ne fréquente plus les grands événements publics en tant que spectatrice : j’y passe tellement de temps avec les groupes que lorsque je suis « en vacances », je préfère rester à la maison !
Alors peux-tu me dire pour terminer quel album récent tu as particulièrement apprécié, en l’écoutant calmement dans ton salon ?
Sans hésiter, This is Why, la dernière sortie de Paramore.
Merci pour tes réponses, Melissa, nous te souhaitons un excellent été et de fantastiques concerts dans les festivals !
(Rires) Je t’en prie, merci à toi pour le temps que tu consacres à parler de notre album !
Propos recueillis le 17 mai 2023. Un grand merci à Anaïs Montigny de Sounds Like Hell Productions.
L’album Metamorphosis de The Dark Side of the Moon est sorti le 12 mai 2023.