On efface tout, on recommence. Pour les cinéastes et scénaristes actuels, la fin de notre civilisation violente et consumériste arrive souvent par voie virale. C’est le cas du monde post-apo. décrit par Reset : dans Paris désertifié après une mystérieuse épidémie, trois hommes et deux femmes s’unissent pour faire face et fuir loin de la ville. Rien n’est simple : à la menace des infectés cannibales s’ajoute celle d’un gang fascisant et criminel qui rôde entre les tours…
Reset est un projet de série TV mûri durant quatre ans par ses géniteurs, Christelle Gras et Yohan Labrousse. Quatre ans, c’est long, et même très long pour aboutir aux trente minutes de métrage visibles ci-dessous. Oui, mais il en va ainsi dans le pays de France où, à défaut de bandes organisées fachos et de zombies purulents, sévissent des producteurs à la frilosité devenue proverbiale, qui vouent aux oubliettes les scénarios trop orientés horreur/S.F., comme s’il n’y avait pas de public dans l’Hexagone pour les genres de l’imaginaire. Mais Christelle et Yohan ont la rage au cœur et ont fait ce qu’il fallait pour que leur création voie le jour : après, notamment, une campagne de crowdfunding via le site Ulule.fr (qui a rallié à la cause un joli paquet de monde, comme le révèle le générique de fin), Reset débarque aujourd’hui sur la Toile et nous permet de faire connaissance avec ses héros vingtenaires/trentenaires — Dorothée, Issiaka, Patrick, Martin et Virginie.
Les premières minutes, d’une efficacité exemplaire, tapent dans le mille en introduisant les personnages principaux avec rapidité, précision, concision. On se sent tout de suite familier des cinq membres de la bande, du reste fort bien interprétés par des comédiens encore peu connus. Portant le deuil de ses deux filles, Issiaka est la boussole morale du groupe ; Dorothée est un personnage féminin fort, autonome, à l’opposé de Virginie, femme-enfant craintive terrifiée à l’idée de se retrouver seule ; Patrick et Martin forment un autre duo complémentaire au sein de cette drôle de famille recomposée (le premier fanfaronne en jouisseur individualiste et immature, son acolyte est une âme poétique et lunaire).
Tout n’est pas trépidant dans cet épisode-pilote, qui n’est pas non plus exempt de maladresses (quelques atermoiements longuets en intérieur, une course-poursuite, à la fin, qui s’interrompt sans raison valable), et des ressemblances, qu’on croit volontiers fortuites, avec la bande dessinée Seuls de Vehlmann & Gazzotti sont difficiles à réfuter. Mais cette demi-heure d’introduction suffit à emporter l’adhésion, également grâce à un sens affuté du cadre (Christelle Gras signe de belles compositions visuelles) et à deux séquences intenses — la scène de la seringue, le face-à-face dans l’appartement — qui nous vissent le regard à l’écran. Maintenant, il va falloir patienter pour découvrir la suite de l’aventure… Nul doute qu’un compteur de vues qui s’affole motivera enfin des financiers à contribuer à la pérennité de la série. Le visionnement de cet épisode « 0 » soulève une montagne de questions qui ne doivent pas rester sans réponses, et plus d’un personnage attend d’être davantage creusé et développé. Alors amis khimairiens, cliquez sur « play », découvrez, dans le meilleur des cas aimez et faites tourner l’info comme la vidéo !