Comme Doom dans le domaine du jeu vidéo, Le Projet Blair Witch est décidément appelé à donner son nom à un genre, celui du film d’horreur/angoisse filmé caméra à l’épaule. Quelques semaines après Cloverfield et quelques autres avant Diary of the Dead, c’est donc l’Espagne et ses charmes que l’on peut découvrir à travers les soubresauts de la réalisation et de quelques cadavres armés de dents et autres mauvaises intentions. A l’inverse de nombreux films d’horreur « classiques » le Blair-Witch-like rend difficile toute scène initiale qui plongerait déjà le spectateur (et le monstre) dans le vif du sujet. On prend donc de longues minutes pour découvrir le contexte, celui d’une équipe de télévision locale barcelonaise qui passe une nuit avec des pompiers dans le cadre d’une émission sur les activités nocturnes de la ville. On suit alors une intervention a priori sans danger qui va rapidement devenir un véritable cauchemar pour tous les habitants de l’immeuble concerné.
A l’inverse de Cloverfield, ou une menace non identifiée surgit brusquement sans prévenir, la tension de [Rec] prend le temps de s’installer dans une première partie où la panique des personnages reste à peu près aussi contenue que le danger semble l’être. On retrouve alors le traditionnel huis-clos du film « de zombies », avec la touche d’originalité amenée par le support journalistique de la narration. Cette relative tranquillité autour des personnages est tout de même habilement mêlée à des touches d’angoisse sous diverses formes, ce qui crée un équilibre appréciable avec le développement intéressant des différents protagonistes : policier devant gérer la situation au nom de l’ordre qu’il représente, mère de famille, immigrés, xénophobe… le tableau est suffisamment varié pour donner au film un réel interêt de ce côté là. Cela fait pourtant ressortir un possible bémol : la curieuse atrophie des rôles « principaux », à savoir la journaliste et son cameraman, qui n’ont d’autres rôles que ceux de filmer/présenter un sujet et avoir peur en courant.
Hélas, ça n’est pas le seul point faible du film. En effet, si l’angoisse est bien rendue dans un premier temps, le passage à une deuxième partie consacrée à l’action donne un résultat hâché qui n’est pas seulement dû au choix de la caméra embarquée. S’il est évident que le but de cette dernière est d’augmenter le sentiment d’immersion du spectateur (et si sa gestion est plutôt efficace, notamment dans les dégâts qu’elle peut subir), l’utilisation de plus en plus fréquente des ficelles traditionnelles du film d’horreur rend le tout prévisible jusqu’à un final qui frise le grotesque malgré une timide volonté d’originalité qui n’invente en réalité rien de bien nouveau.
En bref, si [Rec] remplit plutôt correctement son contrat auprès de ceux qui aiment se faire peur, il est fort peu probable qu’il résiste à l’épreuve du temps.