À l’automne, James Ellroy a fait la tournée française des popotes pour promouvoir son dernier roman en date, Les Enchanteurs, paru chez Rivages. On l’a entendu dans l’émission Mauvais Genres sur France Culture (et il est aussi venu causer dans La Grande Librairie sur France Inter), on l’a vu sur France 5, on a parlé de lui sur les chaînes d’info… et on a pu lire aussi les propos de l’auteur dans la presse écrite, notamment dans le présent numéro de Métal Hurlant. L’interview démarre page 51, c’est Julie Malaure qui est allée cuisiner le monstre dans un bureau de son éditeur français. Comme à son habitude, Ellroy ne mâche pas ses mots, il joue une partition provoc qu’il connaît bien, à grands coups de jugements sans appel. Personnage central de son roman, Marylin Monroe « était une idiote » (et Liz Taylor aussi), elle avait « la profondeur d’une tortilla ». Freddy Otash (le héros du livre, qui a aussi vraiment existé) était « le plus gros tas de merde de l’histoire de Los Angeles », « un fils de pute », « un enculé », etc. C’est très distrayant, et on est content de lire aussi qu’Ellroy aime beaucoup les Français, plus ouverts à ses romans que le sont ses compatriotes (les « trumpistes » purs et durs aimeraient sans doute sa prose droitière, mais ils ne lisent pas beaucoup).
Le thème de ce Métal numéro 13, c’est la vengeance. Interrogé sur la question, Ellroy déclare n’éprouver aucune amertume lui intimant d’aller régler des comptes. Plus loin, ce sera au cinéaste canadien Xavier Dolan de se prononcer sur le sujet à la faveur d’un autre long entretien. Idem pour Gaspar Noé, qui revient, invité par David Mikanowski, sur la genèse de son film Irréversible. Et sinon, eh bien, Métal reste Métal, l’essentiel des 300 pages du magazine est dévolu à la bande dessinée. Vedette du précédent numéro consacré à H.P. Lovecraft, Cthulhu fait une plaisante réapparition dans le très rigolo Chtulhu à la montagne de Pixel Vengeur ; Vengeance divine de Marvin Paval et Fabio Ruotolo démonte en neuf planches l’absurde tyrannie du concept même de religion ; le rédac’chef de Métal, Jerry Frissen, signe le scénario criminel de Le Loup qui gagne est celui que tu nourris (dessiné par Afif Khaled), tandis que Le Vide qui nous sépare de Valentin Ramon nous embarque dans le cosmos pour démontrer que le désir de vengeance d’un seul peut condamner une espèce tout entière. Car finalement, voilà bien les questions qu’on se pose à l’ouverture d’un tel volume : rancune, ressentiment et rancœur sont-elles des sentiments stériles ou féconds ? Et la vengeance une ambition légitime ou un raccourci fatal vers l’enfer ? Réponses et vérité se nichent peut-être dans les pages de Métal…
En kiosque et librairie depuis le 20 novembre 2024.