Initialement prévu pour une exploitation en 2008 dans les salles françaises, ce premier long métrage du réalisateur et scénariste espagnol Paco Cabezas est finalement passé à la trappe dans les calendriers des distributeurs. Qu’à cela ne tienne ! Sorti à la vente ce 5 mai, le dvd des Disparus (titre original : Aparecidos, soit « les apparitions ») est l’occasion rêvée pour découvrir enfin ce film magistral, présenté hors compétition l’an dernier au festival de Gérardmer.
2001. Revenus en Argentine pour se rendre au chevet de leur père mourant, Malena et Pablo se lancent dans un voyage vers la Terria del Fuego afin de se retrouver et de réfléchir au tragique événement qui touche leur famille. S’élançant sur la route dans une vieille Ford Falcon, ils découvrent un journal intime détaillant, photos à l’appui, des crimes atroces commis vingt ans auparavant. Intrigué, Pablo décide de passer la nuit dans un hôtel, sur la route de Buenos Aires, où ces exactions ont eu lieu…
En fait, Aparecidos n’a pas été très bien accueilli dans les pays hispaniques, beaucoup ayant accusé Paco Cabezas d’exploiter la tragédie de tout un pays dans le seul but de mettre en scène un film de trouille. Car il s’avère, dans l’histoire, que le cahier trouvé par Pablo est celui d’un ancien tortionnaire, à l’œuvre lorsque l’Argentine, entre 1976 et 1983, était entre les mains d’une junte militaire. Lorsque la démocratie fut restaurée, on dénombra ainsi 340 centres secrets de détention dans lesquels 30.000 citoyens, qualifiés de dissidents, furent torturés et assassinés.
Un point de vue qui se défend, mais, a contrario, on est aussi en droit de penser qu’Aparecidos trouve justement sa profondeur et sa légitimité en faisant siennes de telles racines historiques. Frère et sœur, Pablo et Malena sont des jeunes gens qui n’ont pas connu les jours sombres de la dictature, et les fantômes qu’ils croisent dans leur périple — une famille persécutée par un mystérieux « docteur » — viennent inscrire dans leur mémoire la tragédie des Disparus. L’Argentine, semble avancer le film, restera à jamais hantée par le souvenir de ces milliers de défunts, et c’est peut-être ce qui la sauvera en lui évitant de reproduire, comme l’espère Pablo, bouleversant d’optimisme dans la magnifique scène finale, les erreurs du passé.
Outre la beauté de la photographie et la perfection de la mise en scène de Cabezas (le découpage de chaque scène est un travail d’orfèvre), Aparecidos doit également beaucoup à ses comédiens principaux, Javier Pereira et Ruth Díaz, impliqués corps et âme dans leur rôle. La densité de leur interprétation nous associe aux peines des deux personnages, on vit littéralement le drame à leur côté. Chapeau !
Image : 2.35, 16/9 compatible 4/3.
Son : version originale espagnole 2.0, version française 2.0 et 5.1. Autre atout du film, les effets et ambiances sonores ont bénéficié d’un travail considérable. Vraiment, coup d’essai, coup de maître sur toute la ligne, señor Cabezas !
Sous-titrage : français.
Bonus : bande annonce du film.