Pourquoi s’être engagé alors qu’il était deux fois réformé ? Les lettres à son amour qui un jour s’espacent et n’ont plus de réponses au point de le désespérer lui qui s’accrochait à elles, à elle ; Les colis, les tranchées, la mort des amis, celle d’Alain Fournier qui a manqué le Goncourt l’année d’avant au détour d’une page et ces pages entre noir et ocre d’où émergent des hommes hagards qui foncent, meurent, tombent aux côtés de leurs compagnons. Le retour à l’arrière comme quelque chose d’irréel, d’un autre monde et puis toujours repartir. Croiser Albin Michel qui lui prend son livre sans l’avoir lu de prime abord, manquer la Goncourt face à une certain Marcel Proust et avoir le prix Fémina en 1919, la vie qui déborde toujours insolente alors que ces hommes se battent meurent et disparaissent dans les tranchées.
Véritable coup de poing, ce récit emporte, prend aux tripes toujours et encore si longtemps après, comme si on plongeait en direct avec l’auteur dans la guerre, dans l’incompréhension qui se tisse avec l’arrière, dans la peur de mourir, le courage, le désespoir.
Le travail de Facundo Percio est surprenant, magnifique et vivant, il accompagne de la plus belle des manières, l’histoire, sa reprise par le scénario de JD Morvan, chaque dessin montre la vie qui lutte, la mort qui rôde, des vignettes viennent s’interposer entre les récits… Totalement prenant, totalement réussi. Une grande bande dessinée, qui vient poursuivre le chemin entrepris par Roland Dorgelès, témoigner de la guerre, de sa cruauté et de sa monstruosité. On aime !