Un projet fou, initié par Régis Lejonc qui a réussi à convaincre neuf auteurs et autrices de grand talent (rien qu’à lire la liste on frémit de plaisir) . Tout commence avec celle qu’on retrouve à la fin : la mort. La terrible malédiction qui frappe ce bébé même pas né, sacrifié pour sauver une autre vie et le rire de l’enfant qui étrangement touche celle que rien n’émeut jamais et voici 9 histoires qui vont s’enchaîner redonner vie à Gaya sous d’autres formes, en d’autres temps, 9 vies comme un chat dit-on, neuf vit et cent en une, pour un destin, des destins hors du commun.
Le premier chapitre merveilleusement écrit par Ghislaine Roman, nous entraine dans un château du Moyen-Age, menacé par la guerre qui arrive et dont le roi va partir au combat, laissant sa reine enceinte, désespérée de son départ. Si bien écrit qu’on plonge dans l’histoire, pris au piège avec le sentiment que la guerre gronde à nos portes. Et puis un jour une étrange apparition, un homme chat qui propose un marché ignoble à la reine Sigrid, qui finira par l’accepter. La malédiction est lancée, le bébé va être remise à la mort mais saura on ne saura jamais pourquoi l’émouvoir juste ce qu’il faut pour que la suite existe.
Car elle existe bel et bien, des lieux, des environnements, des personnages différents, mais toujours des menaces sourdes sur ces femmes ou jeunes filles qui doivent se plier aux convenances et aux mariages arrangés, à la maladie, à la disparition de parents ou au manque d’amour… Des jeunes femmes fortes qui reprennent toujours la maîtrise de leur destin, même quand le fantastique s’en mêle, avec des échos lointains, presque invisibles de l’histoire du départ qui ressurgissent une fois le chapitre ou l’histoire terminée dans nos mémoires étonnées et notre esprit concentré sur ces merveilles qu’on nous raconte. Parce que le pari de Régis Lejonc a fonctionné. Le défi lancé à ces neuf auteurs a pleinement marché. Tous savent écrire comme personne et pourquoi on dirait presque que leurs écrits ne forment qu’une seule voix. Tous savent raconter, tordre des histoires, et pourtant on a l’impression que la malédiction (heureusement pour nous) les a attrapés au vol et qu’ils nous entraînent dans des univers, qui parlent de destin, d’entourage, de famille plus ou moins aimant, plus ou moins toxique, avec parfois le reclus au fantastique et à la magie mais qui tous nous entraînent sur les traces de Gaya, Gha Yuan, Gaya, GawaGalla, Goia, Kilian, Gayane et Guaya la dernière devenue une vieille dame qui ferme la boucle du temps et enfin se laissera définitivement emporter par la mort revenue au premier plan de l’histoire.
Dans ces neuf vies, vous rencontrerez des enfants, des jeunes femme, une vieille dame et d’autres personnages secondaires, des animaux, des créatures fantastiques qui ont tous quelque chose à vous raconter à vous montrer. Au fil des pages, on sent qu’un fil tenu nous entraîne, solide pourtant et qu’il nous raconte ces vies, mille et une à la fois et nous embarque entre réflexion et imagination.
Les illustrations de Régis Lejonc achèvent de donner une colonne vertébrale visuelle à l’ensemble, alors même qu’il change d’univers et d’époque à chaque fois : c’est juste somptueux le tout renforcé par le très grand format de l’album qui permet d’offrir aux lecteurs un écrin magnifique (couverture renforcée toilée..).
Vous l’aurez compris cet album est immanquable. Il vous embarquera sans coup férir dans des univers extraordinaires, magnifiquement écrits (bravo aux autrices et auteurs, quel talent) et cet album va devenir une des merveilles de votre bibliothèque qu’on ressort régulièrement pour le feuilleter, le relire et le partager avec d’autres petits nouveaux qui viendront le découvrir. Une réussite totale ! Bravo !