L’ouverture rappelle la vague de films fantastiques sous-marins qui occupèrent les écrans à la fin des années 1980 : au fond d’une crevasse océanique gît un sous-marin échoué avec son équipage. Un dur-à-cuire déboule, missionné pour le sauvetage, puis une force inconnue, titanesque, s’emploie à taper dans la coque… Contrairement à Deepstar Six, Abyss, Leviathan… auxquels je faisais tout de suite allusion, En Eaux troubles ne nous immerge pas deux heures durant dans les profondeurs. Le film regagne maintes fois la surface pour relater l’histoire de Jonas — le dur-à-cuire précité, que le prénom prédestine à finir dans l’estomac d’un cachalot —, qui va se mesurer avec quelques spécimens imposants de mégalodons surgissant tout à coup de profondeurs jusqu’ici inexplorées.
Autour de l’Anglais Jason Statham, qui joue le héros musclé au blaze biblique, gravite une ribambelle fatigante de clichés sur pattes (le side-kick black rigolo, le millionnaire sans scrupules, la scientifique bad-ass et sexy, l’Asiatique sage et philosophe, etc.) qui viennent nous rappeler ce qu’on sait déjà depuis lurette, à savoir que les scénaristes d’Hollywood conçoivent leurs personnages comme des figurines Playmobil ré-employables à l’infini dans des intrigues lisses et aux visées bassement mercantiles : tout gigantesque et carnassier qu’il est, le mégalodon à 100% CGI (qui rappelle plus les squales du Monde de Némo que le « Bruce » des Dents de la mer) ne croque que les silhouettes secondaires, il épargne les enfants et les yorkshires et il fait gentiment des ronds dans l’eau tandis que la caméra prend le temps de cadrer ostensiblement les nombreux placements de produits (baskets lookées eighties, montres à gros cadrans, etc.). Coproduction chinoise, le film est également conçu pour faire la promo internationale d’un spot touristique balnéaire hyper-prisé, à trois heures de vol de Pékin. Le cinoche conçu comme une extension sur grand écran de Google Shopping et TripAdvisor.
Film sorti le 22 août 2018.