A chaque fois qu’un projet d’adaptation au cinéma voit le jour, une méfiance instinctive se signale dans notre esprit. Pour les romans une certaine habitude est prise et on ne compte plus les succès littéraires devenus cartons du box office. C’est beaucoup moins évident pour les bandes dessinées, les jeux vidéos ou les séries (animées ou non). Alors quand on s’attaque à un mythe comme Dragonball qui a marqué toute une génération sur ces trois supports depuis le milieu des années 1980 jusqu’au début des années 2000, le risque est forcément aussi important que l’attente.
La première question que l’on peut se poser concerne le scénario choisi pour un film d’1h30 s’appuyant sur une série aussi étoffée. Il tourne autour des fameuses dragon balls, les sept boules de cristal dispersées dans le monde entier et qui, une fois réunies, permettent d’invoquer un dragon mage capable d’exaucer un voeu. Evidemment une telle source de puissance est recherchée par un démon avide de vengeance après avoir passé quelques millénaires enfermé au centre de la Terre, j’ai nommé Piccolo. Heureusement face à lui va se dresser une équipe de héros menés par un Goku de 18 ans, épaulé de maître Roshi (le lubrique Tortue Géniale) et de Bulma, toujours à la pointe de la technologie. Dragonball Evolution est incontestablement destiné aux adolescents d’hier et d’aujourd’hui. Les héros sont donc jeunes et confrontés aux deux fantasmes principaux de leurs florissantes années, à savoir séduire le monde et sauver le sexe opposé (ou l’inverse). Humour, aventure et action sont comme prévu au programme. Mais si les passages plus légers parviennent en général à faire sourire, les scènes de tension ou de combat laissent hélas à désirer. N’ayant jamais été personnellement un fan de manga en général, je sais tout de même y apprécier un sens du rythme à l’efficacité redoutable. Mais là où quelques traits sur le papier pouvaient laisser imaginer de spectaculaires effets, il ne reste plus à l’écran qu’une esthétique de carton pâte qui semble commune à bien des adaptations de ce genre (pensons par exemple à Mario Bros, Double Dragon ou Street Fighter).
En résumé, si vous avez aimé le méchant de The Mask et les costumes des Power Rangers, vous apprécierez Piccolo. De la même façon, si les effets spéciaux des docu-fictions de France 3 dans les années 1990 vous faisaient rêver, les Kaméaméha vous éblouiront sans aucun doute (les boules d’énergie, pas les rois hawaïens). C’est difficile à dire comme ça, mais parfois ce qu’on veut éviter s’impose au bout du compte : ce film est, dans son ensemble, un désastre. Bien sûr il y a des choses qui font sourire, bien sûr il y a des éléments de nostalgie, bien sûr Chow Yun Fat est rigolo… Mais compresser toute la profondeur qu’on peut avoir dans une série (qui n’est pourtant pas non plus un abîme de psychologie) dans un film flashy pour ado sans d’ailleurs savoir vraiment si on vise plutôt le public du manga ou les jeunes d’aujourd’hui, ça ne fonctionne pas du tout. Les scènes sont juxtaposées, on passe de l’une à l’autre sans réelle cohérence et le rythme est mou. Bref, tout ce qu’on pouvait imaginer de pire est sous nos yeux. Ceux qui ne connaissent pas ou peu Dragonball n’iront jamais voir ce film, les fans eux, iront par défi ou par accident.