Spécialisé dans l’horreur depuis ses débuts, dans les années 1980, Junji Ito est l’auteur d’une bibliographie pléthorique dont plusieurs titres ont fait l’objet d’adaptations à l’écran (Uzumaki est peut-être le film le plus célèbre tiré de son œuvre, sorti en 2000). Le présent recueil rassemble onze histoires parues initialement dans les années 1990. Onze nouvelles macabres et cruelles, intemporelles dans la mesure où pas grand-chose ne permet de les situer dans une décennie particulière. De nos jours, donc, au Japon, les héros tous malheureux de Junji Ito connaissent les affres du malaise et de l’angoisse dans des histoires marquées par des peurs profondes autant qu’universelles. Si l’on est un brin claustrophobe, que l’on craint pour sa liberté physique, alors on souffre en arpentant le labyrinthe étouffant de La Ville sans rues, dont les habitants sont contraints de traverser les logements des uns et des autres pour se déplacer ; idem lorsque le mangaka nous condamne à suivre les pas d’un personnage étranger dans sa propre maison infestée par La Moisissure ; et que dire de ce père de famille plongeant son intérieur dans le chaos, détruisant son habitation pour en faire une véritable antichambre de l’enfer ? C’est dans L’Auberge, où à aucun prix on ne voudrait mettre les pieds, surtout à la cave…
Le point commun à toutes ces histoires est leur faculté à dépeindre une réalité où la logique se dérobe, où l’existence prend tout à coup l’aspect d’un cauchemar. Ce n’est pas qu’une formule, on parle bien ici des mauvais rêves, du rêve mauvais, de l’épreuve nocturne dont on met parfois un long moment à s’extirper une fois les yeux ouverts. Junji Ito note-t-il scrupuleusement, à son réveil, les souvenirs de ses propres cauchemars ? Toujours est-il qu’il parvient à saisir l’essence des peurs oniriques, essence qui devient le carburant, si l’on puit dire, de ses horribles histoires.
Disponible en librairie depuis le 16 avril 2025, dans une très belle édition reliée et cartonnée.