En 2008, nous avons eu droit à trois films très réussis fonctionnant sur le principe de la caméra-vérité, dans lesquels l’action est filmée sur le vif par l’un des personnages. Les titres en question étaient Diary of the Dead, [REC] et Cloverfield. Ils reprenaient la formule initiée en 1979 par Ruggero Deodato dans Cannibal Holocaust, et dont l’idée fut reprise 20 ans plus tard par les réalisateurs du médiocre et néanmoins célèbre Projet Blair Witch.
Dans Troll Hunter, André Øvredal choisit d’adopter le même principe. Un message introductif vise à nous faire croire que ce qui va suivre, constitué d’images brutes de décoffrage, sans montage, « authentiques », est le témoignage d’étudiants en cinéma partis filmer un chasseur de trolls dans la cambrousse norvégienne. Les premières images tremblotent, les gars en question (deux mecs et une fille preneuse de son) tripatouillant leur matériel pour s’assurer que tout fonctionne. Là, on a peur, on se dit qu’on est pris au piège, embarqués pour 1h30 de caméra secouée à la poursuite de créatures dont on n’apercevra que le bout de la queue ou de vagues silhouettes. Trolljegeren (titre original) serait-il une arnaque à la Blair Witch Project ?
Hans, le chasseur de trolls (Otto Jespersen) : les lignes à haute tension ? Des clôtures électrifiées géantes pour empêcher les trolls de passer !
Eh bien non, pas du tout ! À la demi-heure de métrage, un petit miracle se produit : devant nos yeux émerveillés surgit un troll, un « vrai », mesurant 15 mètres de haut, avec trois têtes ! Et ce n’est que le premier d’une chouette brochette de spécimens dont on va tout savoir, ou presque, sur la vie et les mœurs (les « infos » à leur sujet, égrainées tout au long du métrage, sont hilarantes). À mille lieues de tout cynisme, André Øvredal invite les spectateurs à s’imaginer que, pour de bon, de très grands géants, puants et tout moches, au faciès grotesque, sillonnent les contrées scandinaves. À la faveur de la nuit seulement (ils sont mortellement sensibles aux UV), ce qui explique que personne ne les voie jamais ! Mais pour qui « sait regarder », les indices de leur présence sont évidents, souligne le chasseur de trolls, pour qui un arbre tombé à terre ou un bête éclat sur un tronc sont forcément dus au passage d’un Gollum maousse costaud… Et le « mockumentary » finit par prendre des allures de fable drolatique, poétique, que n’aurait pas renié le Monty Python. Je dis bien fable car il y a in fine une morale, soit une critique détournée de la manipulation des images — et donc du public — par les médias. Des créatures épatantes (et pétomanes), de l’humour, du contenu… Que demande le peuple ? Troll Hunter est mon coup de cœur ciné de l’été.
Dans les salles le 27juillet.