Résumé :

Commandant de police judiciaire au commissariat d’Asnières, Michel Derolle est appelé en urgence auprès de la Brigade Anti-Criminalité.

En revenant au point de départ, d’où elle a pris en chasse une camionnette qui lui a échappée, l’équipe de la BAC a découvert le cadavre horriblement torturé d’une jeune femme, dans une poubelle, à la lisière de la cité du Luth à   Gennevilliers.

Retrouver le coupable va se révéler extrêmement difficile, d’autres victimes se profilent. L’enquête va amener le flic à trouver certaines similitudes avec une autre affaire classée où il a été mêlé quelques années plus tôt  : un de ces amis photographe enquêtait sur des snuff movies en Thaïlande.

Le passé ressurgit et une course contre la montre commence pour arrêter le prédateur sadique qui réalise un très macabre baroud d’honneur.

Notre avis :

Quatrième roman de Marc Charuel, «  Les abysses du mal  » reprend quelques éléments, «  Le jour où tu dois mourir  » sortit, déjà chez Albin Michel, il y a de cela quelques années  ; en 2011.

Il n’en est pas une véritable suite et peut se lire de façon totalement indépendante (je n’ai découvert le lien qu’arrivé à plus de la moitié de cet ouvrage de 416 pages).

Les années qui séparent les deux histoires se ressentent au niveau de l’écriture. L’engouement pour le genre du thriller est passé par là… Elle est plus concise, et les rebondissements se succèdent de façon plus vive. Même si Marc Charuel ne succombe pas totalement aux sirènes des techniques de page-turning et donne beaucoup de substance à ces personnages, tel Tuan Lagrange.

Le parcours et la personnalité de ce militaire retraité, tireur d’élite (et même certaines zones obscures que l’on découvre un peu plus tard), vont se révéler tout aussi importants pour le roman que la hargne du Commandant Derolle à trouver le caméraman de la mort.

Comme dans tous les romans de l’auteur de «  Chiens enragés  », il y a beaucoup de matière. On n’éprouve aucun doute quant au travail de documentation auquel cet ancien reporter de guerre s’est livré afin de nous offrir un récit crédible et effrayant (pour l’aspect thriller). Mais aussi, extrêmement dépaysant au travers l’évocation de la guerre d’Indochine, et un portrait remarquable et original du Viet Nam.

Ses connaissances des institutions militaires, des us et coutumes des militaires sont également incontestables. Ce qu’il dit du darknet (la face cachée du web) ne relève pas que de l’extrapolation et de la légende (là aussi on sent le temps entre les deux livres qui traitent d’un sujet similaire au travers le développement d’internet- c’est très intéressant).

Encore une fois, pour notre plus grand plaisir, Marc Charuel oscille entre les deux aspects de sa bibliographie  : romans de fiction pure («  Les soldats de papier  ») et essais étayés sur des sujets d’actualité («  L’affaire Boudarel  »).

En conclusion, «Les abysses du mal  » un très bon roman, parfaitement maîtrisé jusqu’à son dénouement.

Un ton réaliste assumé (Marc Charuel démontre avec brio qu’il n’est pas besoin d’aller trop loin pour faire frissonner le lecteur, simple et efficace), qui peut être considéré comme un point fort dans une production du genre qui mise plus souvent sur des techniques d’écriture, la surenchère et le sensationnel tout comme les mafias qu’il met en scène.

Un auteur à découvrir quand on est fan de thriller soigné.