Hiroaki Samura est surtout connu pour sa série L’Habitant de l’infini que Casterman a publié en 30 volumes en France. Il y est question du Japon de l’époque Edô et les combats aux sabres y sont particulièrement mis en valeur, et l’esthétique de l’auteur lui a alors valu d’être remarqué. Il a travaillé ensuite sur des dessins plus sensuels, érotiques. Ce qui se ressent quand, en 2016, les Editions Casterman ont sorti ce diptyque d’Halcyon Lunch.
Nous y faisons la connaissance de Gen Adashino, un quadragénaire qui a perdu l’entreprise qu’il avait créée, quand son associé est parti avec l’argent. Vivant en marge de la société, il s’essaye à la pêche au bord d’une rivière quand la jeune Hyos apparaît à ses côtés. Et là tout va changer. En effet, Hyos a le pouvoir de tout manger, vivant ou non, et de le régurgiter plus tard sous une forme amalgamée de chimère.
Gen va retrouver avec elle l’espoir de mettre la main sur son associé et donc sur son argent. Il va aussi recommencer à être un entrepreneur en se lançant dans les affaires, toujours grâce à Hyos. D’autres compagnons rejoindront l’aventure dont la mystérieuse Triazole qui est originaire de la même planète qu’Hyos, mais qui n’a pas, contrairement à sa cadette, perdu son discernement quant il s’agit de choisir ce qui va honorer son palais.
De prime abord, je ne me serais pas intéressé à ce manga, car sa couverture, bien qu’esthétiquement intrigante, me semblait vide de promesses. De même, je ne connaissais guère les productions mangas de cet éditeur plutôt marqué franco-belge. Un ami m’en a parlé et ce qu’il m’en a dit m’a intrigué : « c’est l’histoire d’une fille qui mange tout et ce manga est drôle ».
Je me suis donc penché sur ce diptyque et ne suis effectivement pas déçu par Halcyon Lunch. L’humour compense largement les quelques incohérences du récit. Cet humour, faisant souvent référence à la culture japonaise et manga – je ne saurais trop vous recommander de vous référer au glossaire présent en fin de chaque volume –, est parfois graveleux dans le genre « he oui ! c’est bien à toi de la ramasser, cette savonnette ». Mais j’ai rarement autant souri à la lecture d’un manga.
Côté graphisme, la mise en page est classique et devient dynamique lors des rares scènes d’action. C’est d’ailleurs un point appréciable que de ne pas chercher à comprendre sur dix planches qui fait quoi lors de scènes de combats qui durent des plombes. Ici, il n’y en a quasiment pas. Le dessin est soigné, les ombrés délicats tant pour les personnages que pour les éléments du décor. Pour la technique chaque volume comprend une double page de bonus où Hiroaki Samura expose ses recherches sur ses personnages. Ce manga est au final une belle découverte.