Ryan Reynolds (Buried), vêtu de rose, taché de sang, et un chat rigolard qui nous nargue de son regard fou… Est-ce un film d’horreur ou une comédie ? Les deux, mes amis ! On commence en musique avec une séquence d’ouverture chantée célébrant le bonheur d’habiter Milton, patelin américain dont les habitants sont nombreux à bosser à l’usine de baignoires, le principal employeur local. Jerry (Reynolds) est embauché au service des expéditions (il empaquette avec enthousiasme des baignoires toute la sainte journée). La p’tite Anglaise du service compta, Fiona (Gemma Arterton), lui a tapé dans l’œil, et c’est un vrai plaisir de voir Jerry manœuvrer en gros sabots pour s’approcher d’elle. Le pique-nique annuel de l’entreprise sera sans doute l’occasion de conclure…
Bon, et l’horreur dans tout ça ? Elle se cache dans l’intimité de l’appartement du bon Jerry qui, en fait, ne tourne pas rond, mais alors pas du tout. Suivi de longue date par une psy, Jerry doit suivre un traitement médicamenteux, faute de quoi il entend des voix, et pas n’importe lesquelles : sans ses cachetons, notre héros converse de longs moments avec ses animaux domestiques — Bosco, le gros chien débonnaire, et M. Moustache, matou hautain et vulgaire qui ne fait rien que balancer des invectives avec un accent écossais ! Bosco est un compagnon de bon conseil, bienveillant à l’égard de son maître. Moustache est un vicelard qui n’a qu’une envie, pousser Jerry au meurtre. Et pourquoi ne pas commencer par Fiona ?
The Voices étonne par son équilibre quasi miraculeux entre le drame psy particulièrement glauque (Jerry a un lourd passif familial) et les longs passages de pure comédie. Marjane Satrapi (Persepolis) passe d’un registre à l’autre pendant près de deux heures, sans qu’à aucun moment on ressente la gêne de brusques ruptures de ton. Une espèce d’état de grâce et des jeux de comédiens (Reynolds assure aussi le doublage des bestioles !) qui ont mis en joie les spectateurs du dernier Festival de Gérardmer : salué par un tonnerre d’applaudissements à l’issue de la projection, le film a décroché sans surprise le Prix du Public (ainsi que le Prix du Jury !) le soir du palmarès. The Voices sera dans les salles le 11 mars 2015. Si vous n’étiez pas à Gérardmer, c’est une sortie à ne pas rater !