En 2009, Batman a eu 70 ans, et, comme pour fêter l’événement, les Français Julien Mokrani et Samuel Bodin ont vu les choses en grand : les deux amis se sont lancés dans la confection d’un fan-film qui ferait honneur à l’œuvre de Bob Kane, le créateur du héros, ainsi qu’aux travaux de Frank Miller et de Dave McKean (qui reprirent chacun le personnage, y apportant une dimension nouvelle grâce à leurs styles respectifs). L’écriture, la réalisation et le montage de Batman: Ashes to Ashes, menés à bien en totale autonomie avec un micro-budget de 6000 euros, en dehors de toute structure classique de production, ont laissé les auteurs « malades, épuisés, pauvres et heureux ». Le résultat, visible ci-dessous, en valait largement la chandelle. Plus qu’une aventure du « caped crusader », Ashes to Ashes, hypnotique, est une plongée façon film noir dans les entrailles du Gotham City des années 1930. L’ambiance est ténébreuse à souhait, Batman, presque privé d’enveloppe charnelle, apparaît comme une ombre vengeresse et furieuse. Un travail d’orfèvre qui soulève inévitablement une question : alors que des talents pareils existent dans notre pays, comment se fait-il que le cinéma français s’obstine à ignorer les univers fantastiques et à refuser de laisser leur chance à des artistes aussi merveilleux ? En 2014, cinq ans après la réalisation de ce film, les producteurs de l’Hexagone se contentent toujours, pour l’essentiel, de financer des produits humoristiques au rabais, consensuels, joués par des amuseurs de la télévision, devant lesquels les spectateurs les moins exigeants ont vite fait de retrouver leurs repères. Il existe pourtant des alternatives, visibles pour l’heure en dehors des multiplexes et des circuits traditionnels de distribution, et en voici un formidable exemple.
Depuis la diffusion d’Ashes to Ashes, Julien Mokrani a mis en scène un second fan-film, Welcome to Hoxford, que je vous invite sans plus tarder à découvrir en cliquant ici.