Déçus par leur vie conjugale, une bande de potes dopés au houblon organise une virée dans un bled minuscule où, à ce qu’on dit, la population masculine est sous-représentée, laissant se languir les nombreuses ladies de la région. À leur arrivée, les amis découvrent bien un village envahi par les femmes, mais toutes sont devenues des zombies !
Accusé Jake West, levez-vous à l’énoncé des charges qui pèsent contre vous. Dans votre dernier film Doghouse, les nanas sont des pestes soûlantes, elles prennent la tête des mecs, ensuite, elles veulent carrément les manger ! Dites, vous ne seriez pas un affreux misogyne, par hasard ? Qu’avez-vous à dire pour votre défense ? « Il faut comprendre que les femelles zombies dans Doghouse ne sont pas seulement des cannibales psychotiques assoiffées de sang, elles sont un mélange des peurs primales que les hommes ont à l’égard des femmes. Le personnage de la fille aux ciseaux, par exemple, représente la peur de la castration. Celui de la Mariée représente la peur de l’engagement, la Bouchère est la crainte d’une supériorité physique des femmes et la Sorcière implique la peur du mystère, de l’intuition féminine. » (Les propos du réalisateur sont tirés du dossier de presse du film — NdR).
D’accord, d’accord. Ces lumières nous éclairent un peu sur la présence, dans un trou perdu en pleine cambrousse, d’une dominatrice en latex et de strip-teaseuses blondes platine. Tout serait donc dans la métaphore. Voilà pourquoi on peut admirer à l’écran de tels spécimens : Mamie-sécateur (planquez vos roubignoles, les mecs !), le pasteur (dans l’église anglicane, les nanas ont le droit de porter la soutane, admirez donc celle-ci) et la Bouchère dont vous parliez à l’instant, Mr West…
Le casting féminin a l’air de s’être fortement impliqué dans le film, malgré le machisme de vos roteurs de bière. À se demander si elles n’ont pas travaillé sous la menace… « Nous avons bossé avec une formidable équipe de filles, notamment Emily Booth (Grindhouse) et Alison Carroll (égérie du jeu vidéo Tomb Raider). Le reste de la bande s’étend d’une dominatrice à plein temps jusqu’à une star de spectacle burlesque. Ces filles possèdent un vrai girl power et mènent les garçons par le bout du nez. Et elles sont en forme, entraînées. En plus de subir quatre heures de maquillage quotidiennes, elles ont eu beaucoup d’efforts à fournir pour se transformer en créatures horrifiques. »
Soit. Je crois d’ailleurs savoir que le chef maquilleur de votre staff n’était autre que Karl Derrick, qui a bossé sur Les Frères Grimm de Terry Gilliam et plusieurs Harry Potter. Quant aux croquis préparatoires, ils ont été exécutés par James Ryman, une pointure de l’illustration dans le domaine de la fantasy. À titre d’exemple, j’ai justement ici quelques pièces fort utiles à l’instruction :
Le résultat transposé à l’écran est tout de même moins classe. J’en veux pour preuve la Mariée ci-dessous…
…mais je dois souligner que vous avez eu recours à des effets spéciaux de maquillage à l’ancienne, sans recours au numérique, ce que les puristes de l’horreur sur pellicule — et j’en suis — apprécieront.
Pour mener le casting masculin, Mr West, vous avez fait appel à l’impayable Danny Dyer, qui m’a bien fait rire dans Severance de Christopher Smith. On le retrouve chez vous dans un rôle similaire, celui d’un glandu trentenaire tantôt veule, tantôt sympathique, qui a bien sa place dans le boys band réuni pour le film.
Danny se tient tout à gauche. A l’opposé sur la photo, Christina Cole interprète Candy, la conductrice du bus loué par les amis pour partir en week-end. Elle aussi ne va pas tarder à mal tourner…
Sinon, Doghouse ne donne pas une image très bucolique de la campagne anglaise. C’est l’office de tourisme du coin qui a dû être content ! « L’un des principaux challenges a été de créer le village imaginaire de Moodley. Après de nombreuses recherches, nous avons finalement décidé de construire notre propre village dans un ancien hôpital, dans le Midhurst West Sussex. Nous avons installé un bar et des loges dans les blocs opératoires ! L’équipe a été un peu déroutée au début, mais ils se sont vite approprié l’endroit. C’était parfait pour ce que nous faisions, un peu comme filmer dans l’hôtel Overlook de Shining ! »
Comme vous y allez, Mr West ! Une comparaison avec Stanley Kubrick, carrément ! J’ai beaucoup de sympathie pour les punks dans votre genre, vous n’avez que faire de la bienséance, du politiquement correct et du bon goût, c’est tout à votre honneur, mais vous n’êtes pas non plus un virtuose de la mise en scène. Vos personnages et vos dialogues sont marrants, ce qui n’empêche pas l’action de se traîner un peu. Les péripéties sont parfois répétitives, molles du genou, la loufoquerie paraît convenue (voir la séquence où les guys se travestissent en femmes pour passer inaperçus). On est loin de Shaun of the Dead, pour citer un titre à l’esprit voisin. Quant au dernier tiers du métrage, on a le sentiment que vous l’avez improvisé au jour le jour sur le plateau, sans même prendre la peine de ménager une conclusion digne de ce nom.
Mais bon, on discute, on discute, et il faut bien rendre un verdict. Tout bien pesé, votre Doghouse est effectivement assez fun, Mr West, un peu Z sur les bords, on l’aura compris, mais assez jubilatoire pour mettre de l’ambiance dans un festival (le film a été projeté en séance de minuit au dernier festival de Gérardmer) ou passer une soirée cool entre potaches devant le home cinema. Mr West, vous êtes donc un fumiste, mais un fumiste sympathique qui aime les vampires (voir Razor Blade Smile), les extraterrestres (Evil Aliens) et les morts-vivants. Le prévenu est un mec relax, il est aussi relaxé. Happy, Mr West ?
Joyeux film à tous ! Et n’oubliez pas la Guinness avant d’appuyer sur Play…
Le dvd sera disponible à la vente le 20 juillet (CTV International).
Durée : 89’
Son : anglais et français, dolby digital 5.1
Sous-titres : français
Suppléments : scènes coupées, bêtisier, making of, bande annonce.