Jusqu’alors, le pays était régenté par des baronnies tyranniques et injustes. Tout change lorsqu’une troupe de mercenaires écrase ses derniers, unifiant le royaume sous une seule bannière plus juste et équitable. Mais des années plus tard, alors que le roi est mourant, le royaume s’effrite, en proie à d’intenses luttes de pouvoirs internes.
Le Banni est la création de deux auteurs encore peu connus mais sur lesquels le Lombard a mis le paquet – il est d’ailleurs bien agréable de voir un éditeur défendre avec autant ferveur une œuvre ne répondant pourtant à aucun des critères considérés comme bien établi auprès du grand public, et dans un genre qui a de plus été longtemps absent de son catalogue.
Lorsque Tolkien (re)lance la mode du médiéval-fantastique dans la littérature, et au-delà dans les divers médias par la suite, il utilise des archétypes tellement ancrés dans le subconscient mythologique des Européens qu’ils s’imposent dans toutes les œuvres du genre pendant plusieurs décennies. Peu arriveront à se détacher des sacro-saints Elfes, Nains et autres Orcs et Dragons, encore moins à imaginer un cadre médiéval imaginaire ne faisant pas ou peu intervenir de telles créatures fantastiques.
Le Trône de Fer de George R.R. Martin est de ceux-là. S’il ne fut pas le premier, il a clairement ouvert une voie auprès du grand public, quoiqu’encore peu empruntée. Le Banni fait parti de cette lignée. Il pousse toutefois encore plus loin son héritage en bannissant entièrement toute trace de fantastique de ses cases – ce qui n’est d’autant pas négligeable que le côté visuel de la BD prédispose au contraire le média au spectaculaire et aux effets spéciaux.
Les auteurs se seraient-ils trompés de support alors ? Le talent graphique dont fait preuve le dessinateur prouve que non. Sa capacité à dépeindre avec force la décrépitude d’un roi à la fin d’un règne qui n’aura pas tenu ses promesses, où encore un ancien combattant désormais plus marqué par le vin que par les stigmates des combats, valent tous les discours du monde.
Ce parti pris quasi naturaliste s’accompagne avec cohérence de choix graphiques intéressants. La mise en couleurs directes, qui donne un résultat plus naturel, s’accompagne d’un travail détaillé sur les visages. Dans cet univers d’intrigues où chacun tente de manipuler chacun, une telle précision sur les expressions faciales n’est pas un luxe. De quoi pardonner les quelques erreurs anatomiques, mineures mais bien visibles, du dessin.
Ne vous laissez pas abuser par le graphisme : le Banni ne fait en réalité preuve d’aucune esbroufe et distille son univers, son histoire et ses enjeux de manière subtile. C’est une œuvre fulgurante qui marque le lecteur sur la durée. Le Lombard ne s’est pas trompé de cheval !