Une pensée m’interpelle au visionnement de cette Cabane dans les bois (un rattrapage en dvd, en ce qui me concerne, ayant occulté le film à sa sortie en salles en mai dernier) : il est rigolo, dorénavant, de recenser les différentes manières qu’ont les scénaristes de justifier que leurs personnages ne se jettent pas sur leur téléphone portable chéri pour appeler à l’aide et tuer dans l’œuf tout suspense en signalant que des tueurs sont à leurs trousses. Certains, comme Alexandre Courtès (The Incident) ou le duo Gaillard & Robin (Last Caress), situent leurs histoires dans les années 1980, d’autres s’arrangent pour que la future victime donne un coup de fil penchée sur les toilettes et fasse tomber le GSM dans la cuvette (Sarah Butler/Jennifer dans I Spit on your Grave). D’autres, encore, prennent le soin de préciser, via le dialogue, que les protagonistes partent s’isoler dans un no man’s land non couvert par le réseau de téléphonie mobile. L’Antarctique, alors, ou le sommet du Kilimandjaro ? Eh bien non, dans La Cabane…, un coin de campagne américaine fait l’affaire, à une journée de route à peine en camping car. Un territoire propice aux pires exactions, comme le suggère ce pompiste misanthrope et misogyne, adepte du tabac à chiquer (c’est dégueulasse !), qui prévient les héros — cinq étudiants — de ne pas se rendre dans la cabane du titre, à moins de vouloir en sortir les pieds devant. Bien sûr, l’avertissement n’est pas pris au sérieux par Dana, Curt, Marty, Holden et Jules (qui est une fille, interprétée par la blonde Anna Hutchison). Les amis entendent bien passer le week-end dans une cabane paumée au fond des bois, c’est donc ce qu’ils feront, pour notre plus grande joie…

Ce point de départ est d’une banalité à se pendre, mais les auteurs Drew Goddard et Joss Whedon ont autre chose en tête qu’un remake de Vendredi 13 ou d’Evil Dead. Nous autres spectateurs apprenons dès l’entame du film que le tas de vieilles planches est truffé de caméras-espion, et que tous les faits et gestes des cinq potes sont surveillés par une armada de gens portant cravates ou blouses blanches, protégés par des vigiles armés et planqués dans une sorte d’énorme complexe souterrain hi-tech. Et ces curieux techniciens, du reste pas antipathiques pour deux sous, ne se contentent pas de mater Anna Hutchison topless : une multitude de commandes leur permet d’influer sur le comportement des héros et d’induire leurs réactions face à des événements programmés et, bien entendu, extrêmement horribles, telle une attaque de morts-vivants qui a tôt fait de plonger les potes dans la terreur…

La Cabane dans les bois, c’est donc un peu Big Brother/Loft Story accommodé à la sauce gore. Dans quel but les héros servent-ils de rats de laboratoire ? La fin nous le révèlera, ménageant une belle surprise à la Lovecraft et l’apparition non moins étonnante d’une comédienne chérie par tous les amateurs de S.F. qui fait peur. Le final apocalyptique ouvre la porte à des débordements horrifico-ludiques très amusants, à défaut d’être effrayants. On songe aux lointains Waxwork et Waxwork 2 d’Anthony Hickox, auxquels cette Cabane… finit par s’apparenter. L’ultime bobine réserve également un hommage de bon aloi à Clive Barker et Hellraiser. Des citations qui peuvent sembler encombrantes, énervantes (pour ma part, je conchie le second degré du méta-cinéma façon Scream), mais qui s’inscrivent tout de même dans une cohérence d’ensemble qu’on ne peut que saluer. Alors inutile de bouder son plaisir : si comme moi, vous avez négligé La Cabane… à sa sortie en salles, faites-vous une fleur en mettant la main sur le dvd. Et bonne soirée !

 

Sortie du dvd et du blu-ray le 11 septembre 2012 (Metropolitan Vidéo). En supplément du film, un making of, les coulisses du tournage et des interviews des comédiens. Vous pouvez aussi retrouver Anna Hutchison dans le très sympathique Rotting Hill, court métrage tourné en 2011 par James Cunningham.