Jorg Ancrath n’est pas ce que l’on pourrait appeler un gentil petit garçon. Il a de l’ambition, il veut devenir roi avant ses quinze ans, et de la détermination, à treize ans il est déjà le chef d’une bande de maraudeur. Jorg n’a surtout aucune limite. Pour lui la vie n’est qu’un jeu, et dans un jeu il n’y a que deux issues : la victoire ou la défaite. Jord a décidé qu’il ne serait jamais du côté des perdants, quel que soit le prix à payer.
Il avance pour venger la mort de sa mère, massacrée devant lui. Il avance pour impressionner son père, ce traitre qui a négocié le prix de la vie de sa femme plutôt que de faire la guerre au seigneur responsable. Il avance parce qu’il ne sait plus rien faire d’autre. Il ne connait que le pillage, le massacre, la mort, la terreur des perdants, la folie de la victoire.
Une fois de retour chez lui, après quatre ans de vagabondage, Jorg va découvrir que le monde est plus complexe qu’il ne le pensait, et que si c’est bien un jeu, les joueurs ne sont pas ceux que tout le monde aperçoit sur le bord de l’échiquier. A bien y regarder, il se pourrait que Jorg lui-même ne soit qu’un pion.

Le titre ne sort que le 22 juin prochain, Bragelonne mettant à disposition l’épreuve non corrigée. C’est un coup de coeur de l’éditeur, et la lecture confirme qu’une fois encore Bragelonne sort des sentiers battus de la fantasy.
Le personnage principal n’est pas un héros, ce n’est même pas un anti-héros, c’est un psychopathe. De la première à la dernière page, Jorg n’est que haine, violence, pulsion meurtrière. C’est toute la beauté du roman. L’auteur nous propose de nous attacher à un enfant né dans le sang, vivant par le sang, et refusant de mourir tant que le monde ne sera pas en sang. De quoi donner envie de refermer le livre après quelques pages normalement, et pourtant impossible de décrocher avant la fin (qui n’en est pas une, puisque  le sous-titre est « L’empire brisé – tome 1« ). L’intrigue n’est pas à proprement parlé originale, c’est une énième histoire de la vengeance d’un fils, son ascension vers le pouvoir et les combats qui vont le mener tout en haut. Certains passages sont mêmes franchement à la limite de l’acceptable (le hasard fait toujours bien les choses en fantasy, mais certaines limites ne devraient pas être franchies, et l’affrontement entre Jord et Corion les dépasse allègrement), Jorg a toujours le coup de chance ou de génie qui le sauve. Ce qui retient l’attention c’est l’univers. La carte en début de livre, les noms de certaines villes, indique que nous sommes plus ou moins en France, sûrement au moyen-âge (les chevaliers, les paysans, les châteaux forts), puis petit à petit des détails viennent jeter un doute (Jorg cite Nietzsche), et la vérité commence à se montrer au fil des chapitres.
Autre point très positif : les pensées de Jorg. Mark Lawrence ne  se contente pas d’action et de scènes de combat. Il détaille le cheminement des pensées du héros. Et cela ajoute à la dose d’horreur lorsque sa froideur calculatrice est mise en évidence.
Les courts passages, en début de chaque chapitre, qui présentent un des compagnons de route de Jord sont savoureux.

Des qualités, quelques défauts, mais à coup sûr la présentation de l’éditeur est juste : « un roman coup de poignard ».