Bienvenu à Paris 1900, à l’Exposition universelle. Toute la ville vibre, respire au rythme de l’événement et notamment la famille Charpentier : Hippolyte, sa femme Marguerite, leurs enfants Wolfgang, Clara et leur grand-père Mérowak. Et puis il y a aussi les amis, la famille Robida et le beau suédois héros de l’histoire Lukas Sandström.
Difficile de résumer le Palais des mirages tant les histoires s’imbriquent, se multiplient. Le livre est divisé en trois tableaux : Clara, Lukas et Jean-Sébastien.
Comme dans une attraction foraine réalisée pour les sensations fortes, vous allez entrer doucement dans le monde d’Hervé Jubert, d’abord au spectacle d’Hippolyte Charpentier et du Palais des mirages. Puis l’histoire accélère, les évènements s’entremèlent. Ils sont soit propres à l’exposition : tapis roulants, inventions, multiples palais et attractions, et vous y croiserez Loïe Fuller, la danseuse américaine qui initiera Clara ; soit directement liés à son existence et plus inquiétants : les anarchistes à la recherche d’une scène d’expression comme les frères Paulo et Luigi Dursap au destin tragique ; ce groupe d’hommes d’affaires mystérieux réunis par Narcisse Goldfax ou encore, les « pénitents », cette secte de fanatiques russes appelés Skoptsys née au XVIIIème siècle qui appelle de ses voeux la fin du monde, deux groupes alliés par des intérêts divergents mais qui mènent au même but.
Mais le Palais des mirages est aussi celui des rêves prémonitoires de Clara, des dieux Scandinaves, d’un groupe de nains de la même mythologie, de l’histoire de Tycho Brahe astronome qui à la Renaissance aurait enfermé les dieux scandinaves dans des fioles cachées en Suède à Upsal, fioles dont l’une d’elles perdue va provoquer la catastrophe.
Car des forces obscures sont à l’oeuvre et veulent libérer Loki le dieu de la guerre. Le Palais des mirages est un excellent roman d’Hervé Jubert. Comme à son habitude (voir la trilogie Morgenstern ou celle de Blanche) Jubert fait d’une femme son héroÏne ici Clara Charpentier, la fée du Palais des Mirages.
Il met ici sa plume efficace et précise au service d’une histoire aux multiples clefs : l’exposition ; Lukas Sandström confrontés à ceux qui veulent libérer Loki ; Clara et sa famille déchirée par un drame. Tous ces évènements se mêlent entre précision historique, pointes d’humour (comme les références à Blanche Neige et aux sept nains, l’un des nains se nomme Gandalfr, la tête de l’exposition asiatique qui s’anime et parle) et donnent un récit, une forme de quête haletante, fantastique dans tous les sens du terme.
Hervé Jubert il faut le dire écrit formidablement bien, pas de temps morts dans son livre, il sait nous faire rêver, réfléchir, confronter la réalité et le monde fantastique et ouvrir sur d’autres perspectives plus sombres. Le Palais des Mirages est un roman à plusieurs niveaux de lecture donc destinés à un public large, mais bon lecteur.
A la fin du livre l’exposition ferme ses portes et le XXème siècle s’ouvre porteur d’espoirs fous liés à l’électricité, comme d’inquiétudes et de dangers non encore précisés. Vous n’oublierez pas de sitôt la fée du Palais des Mirages. Très bonne lecture à vous.